Dans cet article, vous découvrirez ce qu’est l’estime de soi contingente, pourquoi c’est un problème et comment faire pour construire une estime de soi plus équilibrée.
Qu’est-ce que l’estime de soi ?
Il est important de commencer par définir ce terme puisqu’il est souvent confondu avec deux autres termes : la confiance en soi et l’image de soi.
La confiance en soi
C’est le fait de croire qu’on est capable de réaliser quelque chose, c’est-à-dire de savoir qu’on maîtrise les compétences requises et qu’on possède les connaissances nécessaires. La confiance en soi est très dépendante du domaine que l’on considère. Ainsi, une personne peut démontrer une grande confiance en elle sur le plan professionnel et une forte anxiété sur le plan amoureux, par exemple. La confiance en soi se développe facilement en s’entraînant à réaliser ce pour quoi on éprouve des difficultés.
L’image de soi
C’est l’idée que nous nous faisons de nous-mêmes sur les plans psychologiques et physiques (source : Wikipédia). Elle rassemble les traits physiques et de personnalité que nous pensons posséder. Cette représentation est éminemment subjective et n’est pas forcément réaliste. Par exemple, après une perte de poids importante, l’image que quelqu’un a de lui-même peut ne plus coller du tout à son poids réel ou à la taille de ses vêtements.
La confiance en soi et l’image que l’on a de soi-même reflètent toutes les deux, de manière indirecte, le niveau et la robustesse de l’estime que l’on se porte.
L’estime de soi
Très rapidement, on peut définir l’estime de soi comme l’estimation globale que l’on a de sa propre valeur.
L’estime de soi n’a rien d’objectif puisqu’elle ne s’établit non pas à partir d’évaluations réelles des compétences ou connaissances d’un individu mais à partir de l’ensemble des croyances et des ressentis que celui-ci nourrit à son égard.
Elle peut être globalement positive ou négative.
Selon F. Lelord et C. André, elle repose sur trois piliers fondamentaux : l’amour de soi, qui serait le plus important des trois, la vision de soi et la confiance en soi.
- l’amour de soi qui représente le sentiment d’être digne d’amour et de respect. Cette dimension renvoie au fait de s’accepter et d’éprouver un amour inconditionnel pour soi indépendamment de ses performances. L’amour de soi se construit au cours de l’enfance, dans les relations d’attachement primaires au sein de la structure familiale.
- la vision de soi représente l’évaluation subjective que l’individu fait de ses qualités, de ses défauts, de ses capacités et de ses limites. Elle est une sorte de « modèle de soi » assez stable. Ce concept rejoint également celui « d’image de soi ». Ce sont les attentes des parents ou des personnes qui assurent cette fonction, qui façonnent peu à peu la vision qu’un enfant développe de lui-même.
- la confiance en soi, comme nous l’avons évoqué plus haut, c’est le fait de « penser que l’on est capable d’agir de manière adéquate dans les situations importantes » (F. Lelord et C. André). Là, c’est le mode d’éducation reçu qui façonnera la possibilité de jouir d’une confiance en soi robuste. Comment sont considérés les échecs et les erreurs de l’enfant puis de l’adolescent ? Récompense-t-on ses efforts ou ses résultats ?
Une estime de soi équilibrée signifie que ces trois aspects se sont développés harmonieusement sans carence ni défaillance majeure issues de l’environnement. Mais il est fréquent de constater que des personnes arrivent à l’âge adulte sans avoir pu construire des fondations assez solides.
Voici quelques exemples de pensées formulées quand chacun des trois piliers est instable :
Amour de soi : « Personne ne peut m’aimer », « Je suis trop comme-ci ou pas assez comme ça pour qu’on s’intéresse à moi », « Je ne mérite pas ce que cette personne fait pour moi »…
Vision de soi : « Ma mère m’a toujours dit que cette carrière n’était pas pour moi », « A quoi bon essayer, je n’ai pas les compétences pour y arriver », « X a raison, je ne suis pas assez courageux.se pour faire telle chose »…
Confiance en soi : « Je préfère rester là où je suis, au moins, je ne prends aucun risque », « Moi, apprendre telle chose ? Je n’en suis pas capable », « Je préfère ne pas demander, on me repoussera à coup sûr »…
Qu’est-ce que l’estime de soi contingente ?
C’est le fait de croire que le regard que les autres portent sur nous-même établit notre valeur en tant qu’humain.
En approfondissant un peu, vous imaginez clairement les implications qu’une telle représentation peut avoir sur tous les domaines de la vie. J’en ai sélectionné trois parmi les plus « handicapantes » :
- les conséquences sur le couple
- les impacts sur la santé psychique
- les implications sur la motivation
Les conséquences d’une estime de soi contingente sur le couple
Lorsque, au cours de votre enfance, vous avez développé une estime de vous-même dépendante du regard des autres, vous ne vous aimez pas beaucoup. Ou alors si, mais pas toujours puisque l’estimation que vous faites de vous-même est fonction des personnes qui vous entourent.
Et donc, lorsque « par miracle » quelqu’un s’intéresse à vous, vous lui en êtes reconnaissant.e au point de vous oublier dans la relation. Ce qu’il ou elle dit de vous prendra la forme d’une vérité et vous ferez absolument tout ce qui est en votre pouvoir pour correspondre à ce que cette personne attend de vous. Vos actes, la manière dont vous vous habillez, la carrière que vous choisirez (ou pas)… toute votre vie sera régentée par les représentations que cette personne a développées à votre encontre.
Parfois, celles-ci seront proches de qui vous êtes vraiment et donc, votre estime de vous-même semblera « protégée ». Mais souvent, cette personne projettera sur vous l’image de quelqu’un que vous n’êtes pas et là, vous allez faire des pieds et des mains pour restaurer « à la surface » une estime de vous-même suffisamment positive.
La plupart du temps, vous n’allez pas quitter cette personne (il faudrait pour cela disposer d’une estime de vous-même réellement solide, qui ne repose pas sur le regard de l’autre) mais « choisir » de vous transformer pour ressembler à cette image projetée. Il arrive même parfois que ce processus soit tellement profondément ancré que vous ne pouvez même pas percevoir que vous vous niez.
Les phénomènes d’emprise puisent leur origine dans une estime de soi contingente de l’un voire même des deux individus du couple. Mais attention, tous les conjoints ne sont pas des personnes qui souhaitent consciemment nous transformer. C’est bien souvent nous-mêmes qui faisons le plus gros du travail en voulant conserver « à tout prix » leur amour.
Les impacts d’une estime de soi contingente sur la santé psychique
De nombreuses études mettent en évidence les liens qui existent entre l’estime de soi contingente et les troubles psychiques tels que la dépression ou l’anxiété.
La dépression se caractérise par « une grande tristesse, un sentiment de désespoir (humeur dépressive), une perte de motivation et de faculté de décision, une diminution du sentiment de plaisir, des troubles alimentaires et du sommeil, des pensées morbides et l’impression de ne pas avoir de valeur en tant qu’individu » (source : Passeport Santé).
Si vous avez construit une estime de vous-même contingente des autres, il n’est pas très étonnant que celle-ci vous prédispose à la dépression. Si votre environnement relationnel (réel et virtuel) est composé (ou a été composé) de personnes très critiques sur vous-même voire même de personnes malveillantes, vous ne pouvez pas avoir le recul nécessaire pour faire la part des choses. Vous prenez tout ce qu’ils vous disent – même les remarques les plus insignifiantes – pour argent comptant. En vous comparant fréquemment aux autres (dans tous les domaines), vous arrivez souvent à la conclusion qu’ils sont « bien mieux que vous ». Vous avez tendance à croire que vous n’êtes pas une bonne personne, digne de respect et d’amour. Loin de vous rebeller contre cette représentation, vous l’intériorisez et l’utilisez – bien malgré vous – comme moteur de vos ruminations morbides. La conséquence comportementale est la perte progressive du goût pour la vie et le repli sur soi.
Dans le cas de l’anxiété – cette tendance à supposer que tout va forcément mal se passer – le processus est différent puisque les émotions en jeu ne sont pas les mêmes. La peur de ce qui va peut-être se produire guide nos pensées. Associée à une estime de soi contingente, l’anxiété conduit les individus à avoir sans cesse peur de ce que les autres vont penser à propos d’eux, peur de ne pas réussir, peur de se retrouver sans ressources, peur de tout ce qu’ils imaginent… Il n’est alors pas rare de les observer développer des stratégies d’évitement, de planification à outrance, de tentatives de contrôle de l’environnement… Sur le plan comportemental, les personnes sont généralement agitées (mais peuvent aussi, quand le niveau d’anxiété est trop fort, être complètement « bloquées »), elles souffrent souvent d’insomnie, de TOC (troubles obsessionnels compulsifs), parfois de colères irrépressibles…
Bien entendu, une estime de soi contingente interagit sans doute avec les autres types de troubles psychiques.
Les implications d’une estime de soi contingente sur la motivation
Selon la TAD (la théorie de l’auto-détermination – qui vaudra bien un article à elle toute seule), « les différences de motivation, de rendement ou de bien-être sont le fruit de l’interaction entre la nature active inhérente à l’individu et les différents environnements sociaux qui la soutiennent ou l’entravent » (Sarrazin, Pelletier, Deci et Ryan – 2011).
Logiquement, si vous avez développé une estime de soi contingente et que vous voulez atteindre un objectif, la qualité de votre environnement social est déterminante sur votre capacité à concrétiser votre projet. Voici quelques exemples d’environnements peu propices : les personnes contrôlantes, blessantes, inamicales… mais aussi celles qui sont mal structurées, peu fiables ou encore velléitaires.
On ne choisit ni sa famille ni ses collègues de travail mais on peut s’en protéger par différentes stratégies :
- s’éloigner physiquement, espacer ses visites
- ne pas répondre au téléphone quand on a besoin d’être soutenu et qu’on sait que la personne n’aura pas la bonne influence sur nous
- couper les ponts totalement, changer de service, d’entreprise
- apprendre à installer des limites claires
- développer une estime de soi équilibrée
Quant aux faux amis, vous savez ce qu’il vous reste à faire…
Quelques pistes pour développer une estime de soi plus équilibrée
Le chemin peut être long mais le résultat est tellement crucial pour chacun d’entre nous qu’il vaut largement le temps et l’énergie qu’on prend pour le parcourir.
- Apprendre à se défaire progressivement du poids du regard des autres – lisez cet article par exemple, pour découvrir comment moins souffrir des critiques que l’on vous fait.
- Progresser sur le chemin de l’amour de soi et sur la satisfaction de ses propres besoins pour lutter contre la dépendance affective
- Travailler sa confiance en soi dans un domaine tout d’abord puis dans un second… et continuer en la transférant à tous les autres secteurs de sa vie.
- Pratiquer la technique CPEAR (Circonstance – Pensée – Émotion – Action – Résultat) de Brooke Castillo à chaque fois que le besoin se fait sentir.
- Approfondir sa connaissance de la théorie de l’auto-détermination (article à venir) et la concrétiser dans son quotidien.
Merci de m’avoir lue jusqu’au bout ! J’espère que cet article vous a plu. N’hésitez pas à m’écrire dans la section « commentaires » vos réflexions sur ce sujet.