Qu’est-ce l’insomnie ? Comment améliorer votre sommeil à long terme ? Quelles techniques sont utiles en cas d’insomnie ? Comment recaler son sommeil ? Voici les questions auxquelles je réponds dans cet article.
Qu’est-ce que l’insomnie ?
L’insomnie est un trouble du sommeil qui se caractérise par un délai d’endormissement anormalement long (plus de 20 minutes). Elle peut-être ponctuelle ou chronique.
L’insomnie touche une partie non négligeable de la population. Même si sa prévalence est difficile à évaluer précisément, on estime que près de 35% de la population adulte éprouverait des difficultés de sommeil et que 10% souffrirait même d’insomnie chronique. Elle peut-être liée à des situations de stress chronique, à un trouble anxieux, à des problèmes de santé ou à des moments de la vie particuliers comme la ménopause, par exemple.
Distinguer insomnie primaire et insomnie secondaire
Selon le DSM-V, les principaux symptômes de l’insomnie primaire sont :
- des difficultés d’endormissement
- des difficultés de maintien du sommeil
- un sommeil non réparateur pendant au moins un mois
- une perturbation du sommeil (ou la fatigue diurne associée) qui cause une détresse clinique marquée
- une détérioration du fonctionnement social ou professionnel
A noter que cette perturbation du sommeil ne doit pas survenir au cours d’un autre trouble du sommeil (ou d’un trouble psychologique) ou être liée aux effets physiologiques d’un médicament ou d’un problème général de santé. Auquel cas, on ne parle pas d’insomnie primaire mais d’insomnie secondaire.
En cas d’insomnie secondaire, il faut d’abord s’attaquer à ce qui la provoque. L’essentiel du travail consistera en premier lieu à repérer la cause de cette insomnie (soucis financiers, problème de santé…) et à la régler.
Si vous traversez une période de stress intense au travail, c’est à ce niveau qu’il faut agir. En cas de douleurs dorsales ou de problèmes gastriques qui vous réveillent, il faut absolument traiter ces aspects tout en soignant l’insomnie. Attention, si vous n’intervenez qu’au niveau du sommeil, l’insomnie persistera.
Prise en charge de l’insomnie
Vous faire aider par un psychologue qui maîtrise les TCC (Thérapies Comportementales et Cognitives) est une option intéressante parce qu’elle évite le recours aux psychotropes habituellement prescrits dans ce cas : antidépresseurs, benzodiazépines et hypnotiques non benzodiazépiniques. Ces médicaments sont parfois indispensables. Un bon psychiatre (quelqu’un qui prend le temps d’écouter votre plainte et que vous pouvez consulter régulièrement) saura vous orienter vers la meilleure option pour votre cas particulier.
Si vous êtes actuellement traité avec des psychotropes, n’arrêtez surtout pas votre traitement seul.e ! Demandez à un médecin de vous accompagner dans le processus de sevrage (qui peut être long).
Comme souvent en TCC, le patient est en première ligne et doit participer activement à sa prise en charge.
La TCC de l’insomnie est constituée d’un nombre limité de séances (6 environ) qui incluent tous les aspects de la thérapie (voir plus bas). Les résultats sont rapides et seront conservés dans le temps si le patient s’engage dans des stratégies actives pour ne pas retomber dans ces anciennes habitudes. Dans cet objectif, le psychologue s’assurera à la fin de la thérapie que la personne est effectivement autonome dans la gestion de son sommeil et qu’elle peut faire face à de « mauvaises nuits » comme tout un chacun.
Les modes d’intervention thérapeutique et les outils utilisés par la TCC (et qui sont développés plus bas) comprennent :
- le journal de sommeil
- la restriction de sommeil
- le contrôle par le stimulus
- la thérapie cognitive
- l’éducation à l’hygiène de sommeil
Un outil : le journal de sommeil
Le journal de sommeil est un outil d’évaluation et de suivi de la qualité et de la quantité de sommeil qui permet de recueillir des informations les plus objectives possibles. Il est complété tous les jours par le patient avant, pendant et après la prise en charge.
Le Réseau Morphée (un réseau de santé associatif francilien financé en grande partie par l’Agence Régionale de Santé d’Ile-de-France) propose un outil téléchargeable pour commencer à documenter vos troubles du sommeil.
L’hygiène de sommeil
Une des premières choses à faire – et peut-être la plus simple – est de supprimer les stimulants (café, thé…) à partir de la fin d’après-midi et de limiter les cigarettes (surtout le soir). Même si l’alcool peut avoir un effet somnifère chez certaines personnes, il modifie la qualité du sommeil et vous réveillera souvent plus tard dans la nuit.
Dans le même ordre d’idée, il est important d’éviter les sports dynamiques en soirée. Vous pouvez par contre, faire du stretching, du yoga, du taï chi chuan…
Essayez de dormir dans le noir complet et au calme et de modérer votre exposition à la lumière bleue des écrans, au moins pendant l’heure qui précède le coucher. Il existe de nombreuses applications et logiciels qui agissent comme des filtres en brunissant l’écran sans l’assombrir – seule la couleur est modifiée sans gêner la lisibilité.
Pour Linux, vous pouvez installer RedShift qui programmera un changement très progressif de la couleur de l’écran en se réglant sur votre fuseau horaire. Sous Windows 10, il vous faudra suivre ces étapes : Démarrer / Paramètres / Système / Couleurs/ (éclairage nocturne) Activé. Avec Apple : Pomme > Préférences Système / Moniteurs / Night Shift.
Par ailleurs, essayez tant qu’à faire de garder la chambre propre et rangée et de l’aérer au moins 10 minutes par jour. La température idéale pour dormir est assez basse (17 ou 18°). Il vaut mieux rajouter une couverture qu’augmenter le chauffage.
Le contrôle par le stimulus
Normalement, la routine associée au coucher (brossage des dents, fermeture des volets…) sert à vous préparer à dormir. Mais quand on est insomniaque, ces habitudes peuvent se retourner contre nous et constituer au contraire, des déclencheurs de stress et d’anxiété vis à vis de ce moment et donc, générer l’insomnie dont on a peur et qu’on voudrait éviter.
Il s’agit alors de rompre les associations inadéquates pour en construire de nouvelles. Et comme on l’a vu plus haut, on peut également intervenir sur les stratégies employées pour limiter les effets de l’insomnie (recours à des excitants pour rester éveillé, sieste, allongement du temps passé au lit…).
Le contrôle par le stimulus est un ensemble de pratiques qui vise à recréer des associations positives entre le lit et le sommeil. C’est un processus qui prend du temps !! Il faut donc s’armer de patience.
Par exemple, si la chambre sert aussi de lieu pour lire, travailler, se divertir, le lit n’est pas associé exclusivement au sommeil mais aussi au travail, au divertissement… Ces activités requièrent une certaine vigilance incompatible avec la somnolence.
Quelques pistes :
- prévoir une heure avant le coucher pour se détendre et déconnecter de toutes les stimulations de la journée – en dehors de la chambre
- n’aller au lit que lorsqu’on commence à se sentir somnolent
- se coucher et se lever à la même heure tous les jours (y compris le week-end)
- n’utiliser le lit que pour le sommeil (et pour la sexualité)
- faire une sieste courte dans la journée si nécessaire (avant 15h)
- se lever en cas d’insomnie et ne se recoucher que lorsque l’envie de dormir réapparaît
Et tant pis si on est crevé le lendemain. Au fur et à mesure des jours, le phénomène d’hyper-vigilance disparaîtra de lui-même. Il faut persévérer (parfois des semaines) car cela vaut vraiment le coup.
La restriction de sommeil
Quand on est insomniaque, on croit qu’en se couchant plus tôt, on augmente la probabilité d’avoir une durée de sommeil convenable. Malheureusement, c’est faux le plus souvent.
Le but de cette technique est de créer un état léger de privation de sommeil qui conduira à la somnolence, laquelle favorisera l’endormissement.
Il s’agit de limiter (au début) l’accès au lit à la durée de sommeil habituelle (si l’individu ne parvient à dormir que 5h en temps normal alors qu’il passe 7h au lit, on limite la durée à 5h pour commencer). Au bout d’une semaine, la qualité du sommeil est meilleure (même si la personne est fatiguée et somnole pendant la journée). Cela peut durer quelques semaines après lesquelles, on peut progressivement (15 à 30 min par semaine) allonger la durée jusqu’à une durée optimale (par exemple : 8h) si le temps passé au lit ne sert effectivement qu’à dormir.
Il vaut mieux ne pas se lancer seul.e et, là encore, se faire accompagner par un praticien formé à cette méthode. Il calculera pour vous les durées optimales et saura les réajuster en fonction de votre évolution.
La restructuration cognitive
Des exercices et des moments d’échange avec votre thérapeute vous aideront à transformer vos croyances et attitudes erronées à propos du sommeil et de l’insomnie.
Si vous ne dormez pas et que vous êtes anxieux vis à vis des conséquences de cette insomnie sur votre santé, vous avez enclenché un cercle vicieux qui génère encore plus d’insomnies. La peur de ne pas vous endormir fonctionne de la même manière.
Il est important que vous puissiez déconstruire vos attentes irréalistes comme, par exemple, viser l’objectif de dormir d’un sommeil de plomb toutes les nuits pendant 8h.
L’infographie ci-dessous liste les principales croyances et attitudes négatives que l’on peut nourrir vis à vis du sommeil. Cliquez sur l’image pour l’afficher en plus grand dans votre navigateur !
Les résistances et obstacles principaux
Trois grandes catégories de résistances et d’obstacles peuvent gêner une TCC de l’insomnie :
- vos croyances et vos peurs : « ça ne marchera pas avec moi », « si je passe moins de temps au lit, je serais trop fatigué.e le lendemain »
- ne pas remplir régulièrement votre journal de sommeil et ne pas suivre les consignes prescrites ou suivre seulement celles qui vous paraissent « logiques »
- manquer de persévérance, résister à changer vos habitudes
Il n’est pas possible de modifier le résultat (le sommeil) sans modifier son comportement et son attitude. Si c’était le cas, vous ne seriez déjà plus insomniaque. On ne peut pas changer en restant la même personne.
Améliorer son sommeil à long terme
Il est possible d’améliorer son sommeil à long terme en prenant tout le temps qu’il faut pour le faire.
Faites confiance à la personne qui vous accompagne pendant cette TCC au moins pendant tout le temps qu’elle durera. Et surtout, soyez patient. on ne peut pas bouleverser 20, 30 ou 40 ans d’habitudes de sommeil en 2 mois !
Des séances de relaxation et de méditation peuvent également vous soutenir pendant la prise en charge thérapeutique, sans toutefois pouvoir s’y substituer. Ce type de prises en charge complémentaires peut vous aider notamment à éviter le burn-out…
J’espère que cet article vous a apporté des pistes de réflexion intéressantes et vous a convaincu que l’insomnie n’est pas une fatalité. N’oubliez pas de vous inscrire à ma newsletter, un billet d’humeur hebdomadaire qui aborde les problèmes que nous vivons toutes et tous de manière décalée.
Merci de m’avoir lue jusqu’au bout ! J’espère que cet article vous a plu. N’hésitez pas à m’écrire dans la section « commentaires » vos réflexions sur ce sujet.
Bonjour et merci pour cet article complet.
J’ai surtout des difficultés au début du sommeil, toute la journée défile devant mes yeux.
Et merci pour l’astuce redshift, je l’installe de suite. Je travaille beaucoup sur PC, même le soir.
Bonjour Cora,
Oui, c’est un problème courant. Tu as des difficultés à décrocher de ta journée – sans doute que tu en fais trop et/ou que tu n’as pas encore réussi à créer un sas de décompression suffisamment efficace. Bonne journée
PS. Désolée de ne répondre qu’aujourd’hui. Ton commentaire était dans les « indésirables ». Je ne comprends pas du tout pourquoi !!??